Record du monde de vitesse à ski

Cédric
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Un homme ne peut pas se déplacer aussi vite, quelqu’un a dû appuyer sur « avance rapide ». Et pourtant. C’est bien la vitesse atteinte vendredi 26 Mars 2016 par Ivan Origone qui, pour y parvenir, s’est servi d’un instrument complexe : une paire de skis. Et d’un moteur surpuissant : la gravité. LE record du monde reste dans la famille puisqu’il détrône l'ancien record détenu par son frère Simone Origone.



Je vous propose d'en savoir davantage sur ce record du monde...



Record du monde de vitesse à ski



⛷️ L'italien Ivan Origone a atteint la vitesse phénoménale de 254,958 km/h et sa compatriote Valentina Greggio a atteint une pointe à 247,083 km/h chez les femmes.


La piste de Chabrières à Vars a permis à trois skieurs de battre samedi le record du monde lors de Speed Masters organisés dans la station des Hautes-Alpes. Simon Billy (252,809 km/h), puis Simone Origone (252,987 km/h) ont d'abord fait voler en éclats le dernier record établi par ce dernier l'an passé (252,635 km/h) mais c'est finalement son frère Ivan Origone (254,958 km/h) qui a mis tout le monde d'accord sur le dernier essai.


«Cette piste a encore du potentiel pour aller plus vite et toucher les 260 Km/h !»

«Cette piste a encore du potentiel pour aller plus vite et toucher les 260 Km/h», a déclaré Philippe Billy, père de Simon (2e aux Speed Masters chez les hommes), le directeur Technique de l'épreuve. En dix ans, le record a progressé à petits pas, passant de 251,40 km/h (Simone Origone) à quasiment 255 km/h. Le premier record du monde établi en 1932 avait permis à Leo Gaspert de dévaler la pente à 136 km/h. L'Américain Steve Mc Kinney avait été le premier homme à franchir la barre des 200 km/h en 1978.

Le ski de vitesse est aussi une discipline où les femmes ne sont pas loins de pouvoir rivaliser avec les hommes. La Transalpine a survolé les débats avec plus de dix kilomètres heures d'avance sur ses concurrentes sur ce couloir d'une longueur de 1400 m (à 2750 m d'altitude) avec une pente maximale de 98% et une pente moyenne de 52,5%!


Vidéo de l'ancien record et interview de Simone Origone:




En se laissant tomber du haut de la piste de Chabrières, gigantesque toboggan enneigé qui servait  de scène au Speed Masters dans la station de Vars (Hautes-Alpes), l’Italien de 35 ans a battu son propre record du monde de vitesse à ski (252,454 km/h), réussi le 31 mars 2014. Ce jour-là, il avait amélioré la meilleure performance mondiale (251,40 km/h) qu’il détenait déjà depuis 2006.

Bref, personne sur terre, sans assistance motorisée, ne va plus vite que Simone Origone, étant entendu que les parachutistes sont hors concours. On voit venir la question, somme toute légitime : à quoi ça sert  ? Comme souvent dans les sports extrêmes, la réponse est simple : à rien, mais c’est magnifique.
Beauté futuriste et bruit d’avion de chasse.

Difficile de ne pas être fasciné par la beauté futuriste de ces projectiles humains évoluant à des vitesses qui défient l’entendement. Pour les badauds sur le bord de la piste, l’effet est saisissant (et se traduit mal en vidéo) : ça va littéralement trop vite. Il faut un petit moment au cerveau du spectateur néophyte pour accepter de concevoir qu’un être humain se déplace si rapidement sans une voiture ou un train autour de lui.

Difficile aussi de ne pas être impressionné par le bruit d’avion de chasse provoqué sur leur passage par ces skieurs hors norme – sauf au niveau du gabarit, semblable à celui d’un skieur professionnel –, que d’aucuns pourraient qualifier de fous furieux. « De l’extérieur, j’ai la même vision, c’est complètement taré, sourit le Français le plus rapide sur des skis, Bastien Montès, 29 ans et un record à 248,105 km/h. Quand tu vois un run (une descente) depuis le côté, tu te dis : “Ouais, c’est quand même assez débile.” Mais c’est un sport de précision, pratiqué par des personnes qui travaillent toute l’année pour aller à ces vitesses. Il y a tellement de recherche en amont, tellement de paramètres étudiés, que la prise de risque est hyperlimitée. »

Le risque ? Notion subjective, explique Simone Origone : « J’ai discuté un jour avec Valentino Rossi (multiple champion du monde de moto), qui me disait : “Tu es malade, sur une paire de skis à 250…”Je lui ai répondu : “Non, c’est toi qui es malade, sur une moto à 350 avec un mec à dix centimètres de toi…” Pour lui, ça, c’est normal. Pour moi, faire du ski de vitesse, c’est normal. »

Le principe de la discipline est d’une simplicité enfantine : une pente rectiligne à dévaler tout schuss, chacun son tour. La vitesse est calculée sur les cent derniers mètres du run, grâce à deux cellules positionnées à l’entrée et à la sortie d’une zone matérialisée par deux traits rouges au sol, de part et d’autre de la piste.« En ce moment, explique Simone Origone, le seul endroit où on peut faire un record du monde, c’est ici, à Vars », sur la piste de Chabrières, lieu saint du ski de vitesse, à l’image de la Streif de Kitzbühel, en Autriche, pour la descente, discipline dont beaucoup de « kaélistes » (spécialistes du « KL », le kilomètre lancé, autre nom du ski de vitesse) sont d’ailleurs issus.

Les 200 premiers mètres (sur 850) sont à 98 % – soit environ 45° –, et une rupture de pente juste après le départ produit cette impression effrayante : la piste tombe à pic et disparaît du champ de vision des skieurs sur le point de s’élancer. Même eux ne font alors pas les malins. « Quand tu sais que tu vas partir d’en haut de Vars le lendemain, tu ne dors pas de la nuit, confie le Français Simon Billy, 23 ans,qui a atteint 246,575 km/h jeudi et qui, pendant tout l’hiver, va s’asseoir de longs moments sur cette piste pour s’en imprégner et la dompter. Au départ, on entend les mouches voler, tout le monde a une boule au ventre. Mais une fois que t’as mis ton casque et que t’as les spatules dans le vide, la peur s’en va. » « A ce moment-là, poursuit Bastien Montès, c’est comme quand tu fais du saut à l’élastique, et que juste avant de sauter, tu te dis : “Merde, est-ce que je suis vraiment attaché  ?”Là, tu te demandes : “Est-ce que j’ai vraiment bien tout fait ?” Ensuite, ce sont des automatismes, tu ne réfléchis plus vraiment. »

Les skieurs basculent, adoptent une position aérodynamique qu’ils doivent conserver le plus fermement possible, et en moins de six secondes, les voilà déjà à 200 km/h. Certains sont en apnée dès le départ. « Un run dure à peu près 17 secondes, mais 17 secondes, c’est une éternité pour nous, décrit Simon Billy. Pendant 17 secondes, c’est un combat. » Face à deux freins : le frottement de l’air, et celui des skis sur la neige. Pour lutter contre le premier, les skieurs sont armés d’une combinaison extrêmement moulante et extrêmement rouge, couleur résistant bien à la chaleur. Une seconde peau en Lycra enduit de polyuréthane totalement imperméable à l’air, dans laquelle les skieurs ont besoin de longues minutes et de l’assistance d’un ou deux collègues pour se glisser tant bien que mal. De drôles d’ailerons derrière les mollets, un casque qui englobe presque les épaules, et des bâtons lestés de plomb optimisent la performance.

« QUAND TU TE RELÈVES, TU AS L’AIR QUI ARRIVE D’UN COUP SUR TOI, C’EST PRESQUE COMME PRENDRE UN COUP DE POING DANS L’ESTOMAC »

« Mets la main par la fenêtre de ta voiture quand tu conduis à 130 à l’heure, et imagine la force de l’air, mais sur ton corps, et à 250, compare Simone Origone. Ça devient quelque chose de solide, et toi, tu dois résister pour dominer ça. » Il faut aussi dominer ses skis, particulièrement longs (2,40 m) et lourds (13,5 kg maximum pour la paire), qui ont une fâcheuse tendance, à cette allure, à filer vers l’extérieur, comme s’ils souhaitaient écarteler leur propriétaire.

Enfin, il faut s’arrêter. L’aire d’arrivée est presque aussi longue que la piste (700 mètres), la pente redevient plus douce, et le combat continue pour les skieurs qui se relèvent alors : « Là, c'est dur, dit Simone Origone. Tu as l’air qui arrive d’un coup sur toi, c’est presque comme prendre un coup de poing dans l’estomac. Tu dois faire attention, sinon tu es par terre. »
« Une ponceuse à bande directement sur la peau »

Les conditions météo – le vent a entraîné plusieurs reports de la course cette semaine – et la qualité de la piste – la neige est idéale au début du printemps, en milieu de matinée – ont une importance décisive. « Jusqu’en l’an 2000, une piste bien préparée, c’était une bonne départementale, ou une mauvaise nationale, sur laquelle il fallait se balader à plus de 240, raconte Philippe Billy, ancien recordman du monde (243,902 km/h en 1997). Aujourd’hui, on a une assistance GPS sur la dameuse, avec une précision de 1 cm. La piste, c’est une autoroute. » Ce qui n’empêche pas le père de Simon d’être « terrorisé » lorsqu’il voit ses deux fils à 240 à l’heure dessus.

Les chutes arrivent, mais sont rarement très graves, notamment grâce à la protection dorsale. « Un entraîneur m’a dit un jour qu’il y avait deux types de skieurs de vitesse, explique Simon Billy. Ceux qui sont déjà tombés, et ceux qui vont tomber. » Lui y a pour l’instant échappé, contrairement à son petit frère Louis, 21 ans, qui lui a raconté : « Les combinaisons sont superfines, c’est comme si on était à poil, alors ça brûle. Il avait l’impression qu’on prenait une ponceuse à bande et qu’on la lui mettait directement sur la peau. »

Les limites sont loin d’avoir été atteintes


Deux « kaélistes » sont morts en course. L’Italien Walter Mussner en 1965, et le Suisse Jean-Marc Béguelin en 1974, tous deux sur la piste italienne de Cervinia, le premier après avoir dévié parce qu’il ne voyait pas où il allait, la tête baissée par souci d’aérodynamisme. Lors des Jeux olympiques d’Albertville en 1992, où le ski de vitesse avait le statut de sport de démonstration, le Suisse Nicolas Bochatay s’était tué en percutant une dameuse, alors qu’il s’entraînait sur une piste parallèle et à une allure modérée. Depuis, bien que ces skieurs aillent plus vite, partent de plus haut, et skient plus fort que les autres, et en dépit d’exceptionnelles audiences télé enregistrées en 1992, leur discipline ne figure plus au programme des JO.

Les principaux intéressés se battent toujours pour obtenir une place dans le giron olympique, qui leur offrirait plus de visibilité que leur circuit de Coupe du monde. Mais plus que n’importe quelle médaille, la quête absolue reste celle du record du monde, dont on est loin d’avoir atteint les limites : Simone Origone a skié à 252,632 km/h alors qu’il ne s’élançait pas du sommet de Chabrières, mais d’une dizaine de mètres plus bas – à la fois parce que la piste, tout en haut, n’était pas en bon état, et parce qu’il ne fallait pas établir un record qui aurait ensuite été trop dur à battre à court terme.

« Sur la piste de Vars, avec les skieurs, l’expérience et le matériel actuels, on sait qu’on peut faire 260, assure Philippe Billy. On peut gagner encore 5 à 10 km/h en faisant évoluer la réglementation du matériel. » D’autres pistes sont à explorer : en 2000, une tour de 16 mètres de haut avec une rampe de lancement avait été bâtie à son sommet pour allonger la piste de Chabrières. Simone Origone, lui, voit plus grand : « Si un jour, quelqu’un découvre une piste de deux kilomètres de long à 45°… »

(mise à jour de l'article 08/2016)

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